[Glané] Le réquisitoire du procureur général : "Notre société a du mal à proposer un futur aux jeunes"

Un article de l'Echo relate les inquiétudes du procureur général de Bruxelles qui, dans son discours de rentrée, fait état de l'augmentation vertigineuse des dossiers de protection de la jeunesse : au niveau national, le nombre d'affaires relatives à la protection de la jeunesse a augmenté de 49% en dix ans, et de 11% en seulement un an, entre 2022 et 2023. La plupart concernent des dossiers relatifs aux mineurs en danger. Selon lui, une partie de l'explication vient du fait que les adultes refusent de vieillir et laisser la place à d'autres. 

Il mentionne également le nombre "impressionnant" de suicides et tentatives de suicide, en moyenne 500 par an à Bruxelles, dont plus d'une cinquantaine concerne des mineurs d'âge. Frédéric Van Leeuw observe là une "spirale de la désaffiliation", issue du mépris social subi et menant à la délinquance. Fustigeant "le programme de certains partis politiques" projetant "d'encore plus faciliter la procédure de dessaisissement", il dénonce une "illustration parfaite de cette démission du monde adulte caractéristique du chacun pour soi : envoyer des adolescents en prison, c’est la solution de facilité".

Lire l'article en intégralité sur le site de l'Echo

[Extrait du Livre Temps d'Arrêt "Vide contemporain et adolescence" par Michèle Benhaim] 
L’adolescence dans un monde vide d’idéaux
Comment penser l’adolescence dans un monde en crise  ?  Difficile, car l’adolescence est un passage qui relève déjà d’une crise, donc, l’adolescent a une double peine en quelque sorte  : il doit se confronter à la violence de ses pulsions pubertaires et à la violence du monde qui, il faut le dire, se déshumanise ; un monde en crise a la particularité de s’être vidé de ses idéaux, or l’adolescence supportera la crise à condition de pouvoir se projeter dans un idéal, un idéal amoureux, amical, professionnel, politique, social ou autre. Or, aujourd’hui, il est pour le moins compliqué de se projeter, d’avoir un espace de pensée dans lequel se projeter, faire des projets, se représenter dans le monde.

À ceci s’ajoutent des événements plus soudains, prévisibles ou inattendus, qui peuvent changer radicalement les vies des uns et des autres, en créant des bouleversements mondiaux et des ruptures dans les rapports humains et les modes de pensée (guerres, épidémies...). Les contextes de vie des jeunes s’en trouvent forcément affectés. Certes, l’histoire est toujours succession de changements, mais le rythme de ces changements s’est accéléré et la mondialisation en répercute immédiatement les effets à grande échelle. L’exemple du Covid et du confinement est parlant : il a produit des phobies. L’imprévisibilité croissante du monde du travail et la difficulté de construire des projets à long terme télescopent celles des idéaux culturels ? Ces idéaux censés forger la conception d’un être autonome, stable, libre, « interne », capable d’identifier ses préférences et ses objectifs, guidé par le désir de réalisation de soi et le désir de réussir.

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