Ce 1er juin 2024, une soixantaine d’associations et de personnalités du milieu de l’enfance publient le manifeste "Bruxelles aux enfants, pour une ville enfants bienvenu·e·s" pour revendiquer une ville à hauteurs d’enfants, respectueuse de leurs droits.
Ce collectif s'interroge sur la manière de rendre Bruxelles adaptée aux enfants, aux adolescents, aux familles : comment faire de l'espace public un territoire où chacun puisse se sentir bienvenu, puisse tisser des liens sociaux, s'y épanouir pour jouer, faire du sport, s'y balader ?
Il souligne que cette question est essentielle aujourd'hui d'une part parce que le temps passé à l'extérieur s'est drastiquement rétréci au fil du temps pour les enfants et les ados et d'autre part parce que leur territoire d'autonomie s'est lui aussi amenuisé considérablement (les enfants ne se déplacent plus seuls dans l'espace public). Cela s'explique par de multiples facteurs dont le fait que les espaces publics ne soient pas adaptés à leurs besoins ni à ceux de leurs parents. Qualifiés de "génération d'intérieur", les enfants restent la plupart du temps chez eux, souvent derrière un écran. De nombreuses études montrent que cela a des conséquences sur leur développement physique (sédentarité, troubles du sommeil, obésité...), sur leur santé mentale (troubles anxieux, dépression...) et sur les liens sociaux qu'ils peuvent développer quand ils sont dehors à jouer librement dans la rue, un parc ou quand, adolescents, ils se retrouvent pour parler, jouer au basket, au foot... Proposer un dehors attrayant, ludique, adapté aux différentes générations est aujourd'hui une question de santé publique.
La carte blanche publiée ce 1er juin souligne que beaucoup de parents voudraient pouvoir sortir plus avec leurs enfants voire leur laisser plus d'autonomie à l'extérieur « J’ai l’impression que je passe mon temps à couper l’élan de vie de mes enfants - à leur gueuler ‘Ne courez pas ! Restez près de moi ! Stop !’ C’est fatigant et déplaisant » témoignage de Camille, mère de deux enfants citée dans la carte blanche.
Voici quelques propositions avancées dans ce manifeste pour rendre cette espace public plus accessible :
- "Garantir l’accès à un espace vert et un espace de jeux à tous les enfants à proximité de leur domicile, en particulier dans les quartiers denses
- Connecter les aires de jeux entre elles en profitant de toute réduction de voiries ou tout réaménagement des espaces publics pour élargir les trottoirs et y multiplier les éléments de jeux (comme les terrains de jeux sur les chicanes à Amsterdam)
- Au delà des parcs et des terrains de jeux, rendre l’espace public plus ludique, y compris sur les trottoirs et placettes
- Proposer des terrains de jeux, terrains de sport en libre-service adaptés aux différents âges
- Végétaliser et déminéraliser l’espace public pour répondre au dérèglement climatique (notamment les vagues de chaleur) renforçant ainsi le contact avec la nature
- Multiplier les moments dédiés aux jeux des enfants comme les rues d’été, les rues aux jeux, les fêtes des voisins..."
(extrait de Bruxelles aux Enfants : Manifeste pour une ville enfants bienvenu·e·s !)
Dans un livre de la collection "Temps d'arrêt", Marie Masson souligne l'importance du dehors pour le développement de l'enfant :
"Fourmillant de possibilités pour relier le corps, la tête et le cœur, le plein air nourrit toutes les sphères du développement en maturation. Dans la nature, l’enfant s’engage tout entier. Le corps en mouvement, à l’écoute de ses sensations et de ses émotions, il vit des expériences riches et variées qui contribuent à son épanouissement. L’apprentissage dehors et le jeu libre en nature apportent des bénéfices tant sur le plan cognitif que sur les plans affectif, émotionnel, langagier, moteur ou encore social.
Dehors, l’enfant est actif. Il ne s’agit plus de l’occuper, la nature s’en charge toute seule. Un enfant actif explore, découvre, cherche, observe, expérimente, ne craint pas de prendre des risques acceptables, se salit, désordonne, crie, court… Le plein air autorise l’enfant à s’engager et à s’impliquer pleinement dans ce qu’il vit. L’enfant noue une relation directe, sensorielle, on pourrait presque dire charnelle, avec la matière et le vivant. Il manipule, sent, ressent, chipote, goûte, creuse, cueille, plante, fait et défait et toutes ces actions qui partent de lui-même lui permettent de mieux assimiler les connaissances du monde qui l’entoure. L’apprentissage par l’expérience où le sujet est invité à agir sur le milieu avec sa tête et son corps fait ses preuves et permet d’ancrer les savoirs de façon plus solide et durable qu’en restant assis et silencieux"
Extrait du Temps d'Arrêt "Le dehors, un terreau fertile pour grandir" de Marie Masson, disponible gratuitement en pdf ou epub.