
Développer la capacité d’empathie des enfants contribue à prévenir et réduire la violence. Qu’est-ce à dire ? La sympathie (étymologiquement « sentir avec »), au contraire de l’antipathie, est un sentiment qui nous rend une personne agréable, par son physique, son caractère, son comportement… Par distinction, l’empathie est la capacité de se mettre affectivement et cognitivement à la place de quelqu’un, pour comprendre ce qu’il ressent et sa façon d’appréhender le monde. Elle n’est pas une simple identification avec la personne, car elle maintient notre différence. Les psychologues travaillent leur empathie, à la recherche de la bonne distance, assez près pour pouvoir comprendre, mais sans aller jusqu’à fusionner, afin de pouvoir aider réellement. Elle est d’autant plus aisée que la personne nous est proche, nous ressemble, que nous vivons des situations semblables ; et plus difficile avec un inconnu, une personne d’un autre milieu, d’une autre culture.
Des clefs de compréhension de nos différences peuvent accroître notre capacité d’empathie, posture qui donc se travaille. Nous faisons l’hypothèse que l’absence d’empathie d’un agresseur envers sa victime donne libre cours à sa violence et ne produit guère de culpabilité. Et qu’inversement la manifestation d’une empathie peut réfréner voire inhiber l’agressivité, rendre plus réflexive et éthique la conduite. Notons que, même originaux, nous ressemblons à d’autres par bien des aspects.
L’empathie est un moyen de connaissance, certain quoiqu’imparfait, des sentiments et de la vision du monde de mon semblable ; et, par là, un type de lien social qui favorise le vivre ensemble, en entraînant la bienveillance. Le développement de l’empathie chez les enfants est donc un enjeu dans la réduction de leur violence. On objectera que l’on peut aussi « comprendre » le bourreau, et pas seulement la victime, et que l’on peut s’identifier à des héros du mal. Un des enjeux de l’éducation est précisément, d’une part, de proposer des identifications éthiquement souhaitables sans tomber, ce qui n’est pas facile, dans une moralisation que rejettent les jeunes ; d’autre part, d’amener à ces jeunes des éléments de compréhension des comportements humains, pour élargir leur capacité à appréhender ceux d’autrui.
in Michel Tozzi, Prévenir la violence par la discussion à visée philosophique, yapaka, pp 52-53
