Internet, au même titre que tout progrès, comporte sa part de nouveaux risques. En permettant de dupliquer à des millions d’exemplaires la pensée humaine, l’imprimerie a servi aussi bien à populariser Gandhi que Mein Kampf. Le cinématographe des frères Lumière a permis la réalisation de chefs d’œuvre mais aussi le développement sans précédent de l’industrie pornographique ou la prolifération de films « grand public » ultra violents.
Alors Internet ? Comme dans tout domaine, l’éducation de nos enfants est un apprentissage des risques de la vie : « Si tu t’approches du feu, tu risques de te brûler. Regarde avant de traverser la rue… » . Mais chacun sait que ce n’est pas en étant mis sous cloche qu’un enfant devient un adulte. Même si, en tant que parent, on le souhaiterait parfois.
Vivre avec Internet est donc apprendre à vivre avec ces risques, sans en exagérer l’importance ni les sous-estimer. Ils sont essentiellement au nombre de trois.
Rencontrer un pédophile
Effectivement, certains adultes « draguent » des enfants ou des adolescents sur Internet. Ce risque est cependant faible et on a tendance à l’assimiler avec le fait que certains adultes visitent des sites pédophiles, ce qui est un tout autre problème.
Prévention :
Avant tout, il y a lieu d’en parler en famille : comme pour toutes ses découvertes, l’enfant attend des adultes un cadre rassurant et structurant qui lui permette de se créer des repères. Aider l’enfant à avoir confiance dans la manière dont il peut ressentir les relations et lui poser des limites va l’aider dans toutes les rencontres qu’il sera amené à faire.
Apprendre à nos enfants à distinguer le vrai du faux, la fiction de la réalité : « Ce n’est pas parce que quelqu’un rencontré sur Internet dit avoir 10 ans que c’est vrai. Tu ne le vois pas, et il peut écrire n’importe quoi ». Ceci commence d’ailleurs dès le plus jeune âge : en décodant avec l’enfant les flux d’informations et de publicité qui sont déversés par les médias.
Apprendre aux enfants à ne pas donner son adresse ni accepter de rendez-vous sans en parler à ses parents. A ceux-ci ensuite d’organiser une éventuelle rencontre car il n’y a pas de raison de principe pour que le virtuel reste cantonné au virtuel.
Etre confronté à des sites pornographiques ou violents
L’enfant ou l’adolescent est curieux de la sexualité et c’est bien normal. De tout temps, il a cherché des informations, des images… une manière de comprendre et maîtriser ce qui se passe dans son corps, ce qui l’attend. Cependant, avec Internet, non seulement les images émergent de l’extérieur plutôt que d’être « imaginées » mais de plus elles vont jusqu’à faire irruption indépendamment du fait qu’on les recherche. Ainsi, elles n’arrivent souvent pas en concordance avec le développement affectif de l’enfant. Le risque essentiel est que l’enfant croie que cette image de la sexualité correspond à la réalité, voire qu’il devra pratiquer « tout cela » pour être dans la norme.
Prévention :
On voit à quel point le décodage des médias tel qu’indiqué précédemment a toute son importance.
Une éducation sexuelle mais surtout affective au sein de la famille et avec des adultes qui favorisent le dialogue permet à l’enfant d’apprendre que sa vie amoureuse, notamment sexuelle, il devra l’inventer pas à pas avec celui ou celle qu’il choisira. Aborder ceci, avec pudeur, au travers des petits faits du quotidien reste la meilleure des préventions face à l’omniprésence d’une sexualité de consommation qui dépasse d’ailleurs Internet.
Mais d’autres « découvertes » peuvent poser problème au développement de l’enfant si elles ne sont pas accompagnées d’une prévention par le dialogue avec les adultes. Pensons à des images de violence gratuite qui, parce qu’elles embarrassent moins les adultes que le sexe, font l’objet d’encore moins de précaution. Là aussi, le décodage, le dialogue, l’explication restent les meilleurs outils éducatifs, tout en gardant à l’esprit qu’une image ou une séquence anodine pour l’adulte peut être troublante pour l’enfant. D’où l’importance d’écouter celui-ci et de rester ouvert à ses questions.
Se perdre dans l’écran
Internet peut autant être un outil de découverte, de connaissance, de communication qu’un gouffre où l’on peut se perdre ; autant un lieu qui contribue à se construire une intimité qu’un espace où l’on tourne en rond de manière compulsive. Comme toute activité, comme tout espace, il doit être limité.
Prévention :
Réfléchir entre adultes et enfants à la fonction des écrans (pas seulement d’ordinateur). En quoi contribuent-ils à s’ouvrir au monde ou à rester enfermé chez soi ? En quoi permettent-il de rencontrer les autres ou de ne retrouver que du même ?
Quoi qu’il en soit, à un moment ou à un autre, c’est à l’adulte qu’il revient de mettre la limite, ne fusse que pour rappeler l’importance de la vie de famille (les repas), de la vie sociale (aller à l’école), du sommeil…
Que penser des filtres ?
Encore faut-il se poser la question de l’âge de l’enfant laissé seul devant Internet : laisse-t-on un enfant de 6 ans sans accompagnement dans une ville qu’il ne connaît pas ?
Les meilleurs filtres sont ceux qui se transmettent dans la relation entre adultes et enfants. Car une barrière extérieure restera toujours franchissable et, dans ce registre, la créativité des enfants ou adolescents est un talent qu’il faut leur reconnaître. Ici comme dans d’autres domaines, la priorité est d’apprendre aux enfants à intégrer des limites intérieures. Elles lui permettront de vivre en société.
Dans certaines situations, et même s’ils ne sont jamais fiables à 100% (ils ne le seront d’ailleurs jamais), les filtres peuvent être une solution pour préserver les enfants les plus jeunes de l’intrusion accidentelle d’images pornographiques ou ultra-violentes par exemple.
Les parents qui souhaitent installer de tels systèmes peuvent se renseigner auprès de leur fournisseur d’accès ou encore trouver sur Internet des solutions payantes ou gratuites.
Il y a lieu de dire aux enfants qu’un filtre est installé et qu’ils n’ont donc pas accès aux mêmes sites que leurs parents.